Le coût de transaction dans le contrat de cession des droits de Pi.

Un coût de transaction toujours plus lourd

Que l’image se fasse à travers le procès kafkaïen ou les 12 travaux d’Astérix, le justiciable qui cherche à contracter afin de valoriser ses droits de propriété intellectuelle est soumis au même fardeau : le coût de transaction. On peut diviser son essence en plusieurs parties : négociation, exécution, protection du droit intellectuel et spécificités des conditions.

Il sera question d’apprécier et d’étayer les différentes difficultés qui s’offrent à celui qui cherche à passer par le contrat. D’autres analyses permettront de comprendre si les nouvelles technologies seront en mesure de faire disparaitre ces inconvénients.

Prémisses :

Le coût total  C_t est fonction de plusieurs variables :

  •  T : le coût de négociation
  •  n : nombre de parties impliquées
  •  C_x : complexité contractuelle (nombre de clauses spécifiques)
  •  D : durée de l’accord (en années ou mois)
  •  V : valeur de l’actif intellectuel
  •  \alpha : coefficient lié à la protection de la PI
  •  \beta : coefficient lié à la spécificité contractuelle

L’équation de base est la suivante :

 C_t = T + (n \times C_x) + (D \times C_x) + (\alpha \times V) + (\beta \times C_x)

Dérivation du Coût de Négociation

Le coût de négociation, noté  T , est directement proportionnel au nombre de parties  n et à la complexité  C_x . Cependant, pour rendre l’analyse plus précise, on peut introduire un coefficient  \gamma_n , qui modélise l’efficacité de la négociation en fonction du nombre de parties.

Ainsi, le coût de négociation devient :

 T = \gamma_n \times (n \times C_x)

avec  \gamma_n étant un coefficient dépendant du type d’accord, par exemple  \gamma_n \in [0,1] .

Dérivation du Coût d’Exécution

Le coût d’exécution  E dépend non seulement de la durée  D du contrat, mais aussi d’un facteur d’efficacité  \delta_D , qui tient compte de la longueur et de la complexité de la mise en œuvre dans le temps.

Ainsi, le coût d’exécution devient :

 E = \delta_D \times (D \times C_x)

Le coefficient  \delta_D modélise l’influence du temps sur le coût d’exécution et peut varier en fonction de la capacité des parties à s’exécuter rapidement.

Dérivation du Coût de Protection

Le coût de protection  P_r peut être affecté par plusieurs facteurs comme la valeur de la PI  V et le niveau de protection juridique  \rho . Le coefficient  \alpha varie selon le type de propriété intellectuelle (brevet, droit d’auteur, marque), mais on introduit ici un coefficient  \rho pour tenir compte du niveau de protection requis.

Nous avons donc :

 P_r = \rho \times (\alpha \times V)

Le coefficient  \rho représente l’effort nécessaire pour maintenir la protection (par exemple, un brevet dans un domaine technologique peut nécessiter plus de protection qu’une marque déposée).

Dérivation du Coût de Spécificité Contractuelle

La spécificité contractuelle  S_c dépend de la complexité des clauses  C_x , mais nous pouvons aussi introduire un facteur de précision  \zeta , qui mesure à quel point les clauses sont strictes ou vagues. Une plus grande spécificité entraîne des coûts supplémentaires de gestion et de surveillance des obligations.

Ainsi, le coût de spécificité devient :

 S_c = \zeta \times (\beta \times C_x)

Le coefficient  \zeta peut être influencé par des facteurs comme le besoin de surveillance continue des clauses ou la nécessité d’ajustements réguliers.


Coût Total de Transaction Raffiné

En intégrant ces éléments, l’équation complète du coût de transaction  C_t devient :

 C_t = (\gamma_n \times n \times C_x) + (\delta_D \times D \times C_x) + (\rho \times \alpha \times V) + (\zeta \times \beta \times C_x)


Approfondissement des Coûts Individuels

  1. Coût de Négociation Raffiné :
    Le coût de négociation peut être influencé par d’autres variables telles que le temps  t_n nécessaire pour chaque cycle de négociation. En intégrant cette variable, le coût devient :

 T = \gamma_n \times (n \times C_x \times t_n)

On peut introduire un facteur de retard  \lambda , qui augmente les coûts en cas de prolongation des négociations :

 T = \gamma_n \times (n \times C_x \times t_n) + \lambda \times (n \times t_n)

Coût d’Exécution Raffiné :
Le coût d’exécution peut également inclure des ajustements réguliers  A , liés à la complexité de la PI ou aux contraintes du marché. Cela donne :

 E = \delta_D \times (D \times C_x) + A

Le facteur  A représente les révisions contractuelles nécessaires ou les adaptations à des changements imprévus (réglementations, nouvelles technologies).

Coût de Protection Raffiné :
Pour le coût de protection, on peut aussi introduire un terme  \theta , qui mesure l’intensité des attaques potentielles (comme le piratage, la contrefaçon). Cela modifie l’équation de la façon suivante :

 P_r = \rho \times (\alpha \times V) + \theta

Coût de Spécificité Contractuelle Raffiné :
Le coût lié à la spécificité contractuelle peut inclure un terme  \xi , qui modélise l’effort additionnel nécessaire pour ajuster des clauses trop rigides ou mal définies :

 S_c = \zeta \times (\beta \times C_x) + \xi


En intégrant tous ces éléments, le coût total de transaction peut être exprimé de manière très détaillée comme suit :

 C_t = [\gamma_n \times (n \times C_x \times t_n) + \lambda \times (n \times t_n)] + [\delta_D \times (D \times C_x) + A] + [\rho \times (\alpha \times V) + \theta] + [\zeta \times (\beta \times C_x) + \xi]


Plusieurs constats s’offrent à nous. D’abord, la modélisation complète du coût de transaction peut être toujours plus étayée. Pour autant, la théorie n’est parfois pas très loin de la réalité et la négociation peut, par exemple, toujours être plus approfondie. Il existe toujours plus de facteurs permettant de faire varier plus ou moins fortement ce coût, propres au domaine des contrats. Pire, la propriété intellectuelle bénéficie d’une friction contractuelle liée à la protection du titulaire, ce qui tend à faire augmenter ce coût.

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Propos introductifs : vers un modèle de licence légale ?

Voler une voiture ? Jamais ! Voler un sac ? Jamais ! Voler une télé ? Jamais ! Voler un film… Jamais ? La Federation Against Copyright Theft (FACT) l’avait pourtant esquissé dès 2004, les nouvelles technologies n’arrivent jamais sans craintes. La crise du disque peut s’apprécier comme l’une des premières crises de l’un des mécanismes fondateurs du droit d’auteur et plus largement, à quelques exceptions près, du mécanisme du droit exclusif. Il n’est désormais plus question de savoir si une nouvelle crise surviendra, mais bien de déterminer l’instant inéluctable où celle-ci se manifestera.

Pour autant, cette omniscience numérique est difficilement compatible avec l’état du droit positif en matière de propriété intellectuelle. Si le caractère rival des biens corporels permet de percevoir aisément les atteintes qui leur sont portées, en revanche, il n’en va pas de même pour le bien intellectuel, qui par nature échappe à toute rivalité. L’horloge technologique poursuit son inexorable progression, et il est fort plausible qu’elle amène à terme chacun à se transformer en contrefacteur en puissance.

Ainsi, avec l’évolution des technologies, la contrefaçon remet en question le modèle de droit d’auteur fondé sur l’exclusivité. En réponse à la crise du disque, l’outil de la licence légale a vu le jour.

Ne serions-nous pas aujourd’hui confrontés à une situation similaire et systémique ?

Le modèle de la licence légale présente de nombreux désavantages pour les titulaires de droits. Elle brise notamment la vision personnaliste du droit d’auteur et détruit le mécanisme d’exclusivité de l’auteur. Pour autant, si la faculté légale d’interdire n’est plus coercitive, le titulaire est privé de la rémunération de son œuvre.

Seront notamment analysées les conséquences économiques de cette privation de rémunération.

  • Le droit d’auteur européen et français repose sur la faculté, pour le titulaire des droits, d’interdire l’exploitation et l’utilisation de l’œuvre par les tiers.
  • Le titulaire peut rendre son œuvre excluable ; le consommateur paie alors le prix de l’accès à l’œuvre (licence).
  • À droit constant, l’évolution des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle tend à faciliter le contournement du caractère exclusif du droit d’auteur.

Le régime actuel de l’exclusivité du droit d’auteur permet au titulaire des droits de contrôler l’utilisation de son œuvre en percevant notamment des redevances par le biais de licences.

Formellement le système s’explique par les paramètres suivants :

  •  p_0 : le prix de la licence
  •  n_0 : le nombre de consommateurs payant pour utiliser/exploiter l’œuvre
  •  U_0 : l’utilité totale des titulaires et des consommateurs
  •  B_0 : l’utilité de chaque consommateur

L’utilité des titulaires s’explique par les revenus issus des licences.

 U_{\text{titulaire}} = n_0 \cdot p_0

Pour les consommateurs, l’utilité correspond au bénéfice de l’œuvre diminué du prix payé.

 U_{\text{consommateurs}} = n_0 \cdot (B_0 - p_0)

Ainsi, l’utilité totale du modèle reposant sur l’exclusivité est le suivant.

 U_0 = n_0 \cdot B_0

Or, la contrefaçon modifie l’équilibre. Désormais une proportion  k des consommateurs utilise et exploite l’œuvre sans payer le prix, ce qui réduit les revenus des titulaires.

 U_{\text{titulaire}} = (1 - k) \cdot n_0 \cdot p_0

Les consommateurs, eux, continuent de bénéficier de l’œuvre, même s’ils ne paient pas tous :

 U_{\text{consommateurs}} = (1 - k) \cdot n_0 \cdot (B_0 - p_0) + k \cdot n_0 \cdot B_0

Finalement, l’utilité totale reste identique :

 U_0 = n_0 \cdot B_0

Le mécanisme de l’exclusivité engendre une sorte de tragédie des anti-communs. L’œuvre, en tant qu’anti-commun, est non seulement sous-exploitée car bloquée par la contrainte budgétaire de certains consommateurs, mais les nouvelles technologies tendent également à favoriser un comportement de passager clandestin, car la contrefaçon touche même ceux qui étaient prêts à payer le prix de la licence.

En réponse à cette tragédie du droit d’auteur, le modèle de licence légale peut être envisagé. Chaque consommateur paie une redevance au moment de l’achat du matériel servant à contrefaire l’œuvre.

L’idée de la licence légale repose sur un constat pessimiste : il n’est pas possible de contrer la contrefaçon.

Soient :

  •  p_L : la redevance légale,
  •  n_L : le nombre de consommateurs dans l’hypothèse d’une licence légale supposé être supérieur à  n_0 en raison de l’accessibilité accrue.

L’utilité des titulaires de droits devient alors :

 U_{\text{titulaire}} = n_L \cdot p_L

Quant aux consommateurs, leur utilité dépend du bénéfice qu’ils retirent de l’œuvre, diminué de la redevance :

 U_{\text{consommateurs}} = n_L \cdot (B_L - p_L)

L’utilité totale dans l’hypothèse de la licence légale s’exprime par :

 U_L = n_L \cdot B_L

Il convient d’utiliser la reformulation de l’optimum de Pareto avec l’outil qu’est le critère de Kaldor-Hicks. Il permet d’évaluer l’efficacité d’un changement de paradigme en comparant les utilités totales avant et après la mise en place d’une redistribution forfaite et dans notre cas de la licence légale.

Si l’utilité totale sous licence légale  U_L dépasse celle de l’exclusivité du droit d’auteur  U_0 , alors le changement est économiquement justifié.

 U_L > U_0

Ainsi, si cette condition est remplie, la transition vers une licence légale serait bénéfique au niveau macro et ce même si certains acteurs voient leurs revenus diminuer temporairement.

Pour que la transition des deux modèles soit avantageuse, la redevance  p_L , bien qu’inférieure à  p_0 doit compenser la perte de revenus par l’augmentation du nombre de consommateurs :

 n_L \cdot p_L > (1 - k) \cdot n_0 \cdot p_0

De même, l’utilité des consommateurs doit à priori être supérieure dans l’hypothèse de la licence légale :

 n_L \cdot (B_L - p_L) > (1 - k) \cdot n_0 \cdot (B_0 - p_0) + k \cdot n_0 \cdot B_0

À travers l’outil Kaldor-Hicks, la licence légale semble améliorer le bien-être collectif malgré des pertes pour certains acteurs. La clef du changement réside plutôt dans l’augmentation du nombre de consommateurs et dans l’équilibre entre le revenu des titulaires et l’utilité totale.

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